Designer textile diplômée en 2009 de la HEAR à Mulhouse (alors École supérieure d’art de Mulhouse), Emmanuelle Jenny travaille autour du motif. Dans sa pratique, elle s’attache à créer des ponts entre l’art et le design.
Une fois n’est pas coutume, nous commencerons notre portrait par un conseil. “Dans ce métier, il faut faire preuve d’humilité et accepter la critique” nous dit Emmanuelle Jenny. Lorsqu’on la rencontre dans son vaste atelier lumineux à motoco (lieu de création artistique situé dans le quartier DMC à Mulhouse, qui réunit 140 artistes et artisans d’art) et qu’elle raconte son parcours, tout semble lui sourire.
À l’entrée, des vêtements d’enfants, quelques pièces pour adultes, des pochettes et autres accessoires sont présentés. Emmanuelle Jenny a lancé il y a tout juste un an, en collaboration avec Manon Hervé — diplômée de l’ESAD d’Orléans et couturière autodidacte –, Eugénie Design, une marque pour petits et grands. “Notre porte d’entrée a été la confection de vêtement pour bébé, avec le sarouel en pièce phare, mais aujourd’hui nous créons également des chemises pour adultes, des bijoux, des accessoires” explique la designer textile.
Tournant
“Eugénie Design est un véritable tournant professionnel, je mets enfin en pratique ma formation à l’école”, raconte Emmanuelle Jenny. L’histoire débute donc à la HEAR (alors École supérieure d’art de Mulhouse – Le Quai). “J’ai choisi d’aller à Mulhouse car l’école enseignait l’art et le design. Je n’ai pas hésité à choisir l’option textile mais je trouvais intéressant de pouvoir constamment me nourrir de la culture artistique qui était autour de moi”, se souvient-elle. Elle travaille notamment le cheveu dans sa pratique textile, l’utilisation de cette matière particulière, ses ondulations : “c’était très expérimental, on me demandait parfois pourquoi je n’avais pas choisi l’option Art !” dit-elle en riant.
Elle découvre à l’école le motif. “J’ai eu des cours au Musée de l’Impression sur Étoffes (MISE), qui ont été déterminants dans ma pratique” poursuit Emmanuelle Jenny. Elle part en stage au Maroc pendant sa scolarité et découvre le motif oriental. “J’ai sillonné ce territoire, passant d’ateliers en ateliers, de villes en villes, de paysages en paysages, d’habitants en habitants… J’ai créé une série de motifs liant la culture marocaine et sa culture occidentale pour ensuite développer une collection de foulards” raconte la designer textile. “J’ai créé des motifs autour de la boucle, de l’arabesque, de l’ondulation du cheveu. Le rapport à la chevelure est particulier au Maroc, les femmes sont voilées, c’était une évidence pour moi de créer ces foulards par rapport à mon univers autour du cheveu”.
Foulard
Après avoir décroché son diplôme avec les félicitations, Emmanuelle Jenny participe à un concours organisé par la Ville de Mulhouse sur la création d’un motif pour un foulard sur le thème du cachemire. “Ce concours était pour moi ! C’est comme si les astres s’alignaient !” se souvient la designer textile. “Mon motif était une énorme mèche de cheveu qui rappelait la courbe de l’arabesque. Avec du recul, c’était osé… Mais ça a marché !” Emmanuelle Jenny remporte le concours et une visibilité.
“Le directeur du MISE a acheté pour le musée deux autres motifs pour des carrés de soie. J’ai ensuite fait une mission de création de scénographie pour le musée. J’étais lancée, je ne me suis jamais arrêtée !” raconte Emmanuelle Jenny. En parallèle, elle multiplie “les expériences avec une joyeuse boulimie” (sic). Elle donne des cours, est médiatrice à la Kunsthalle de Mulhouse, participe à des expositions collectives à Genève et New York, fait une résidence là-bas, parcourt l’ouest des États-Unis, “je me nourris du voyage pour créer” précisera-t-elle.
Aujourd’hui, l’aventure Eugénie Design est le chapitre actuelle de la vie d’Emmanuelle Jenny. À quand le prochain ? Nous ne manquerons pas de vous tenir informé !
Charlotte Staub
(mis en ligne le 02.10.2019)