Le wax est le symbole même des tissus africains, il évoque la culture et la mode africaines. Pourtant il est un produit d’exportation des Pays-Bas, inventé au travers de la l’industrialisation de techniques artisanales, développé par des entrepreneurs néerlandais qui se sont approprié les techniques du batik à Java pour les produire à grande échelle. A la fin du 19e siècle, cette production textile industrielle, de masse mais de haute qualité arrive sur le continent africain.
C’est un textile qui va à partir de là se généraliser, et qui va surtout être l’objet d’une réappropriation permanente entre le continent africain et l’Europe. Plus que cela : le wax est désormais copié et recopié – ce qui contribue d’une certaine manière à le rendre toujours plus incontournable. Au point de peut-être faire passer au second plan les textiles spécifiquement africains, tels que les bogolans maliens, ou encore le rabal sénégalais, ou – plus connus les tissus kenté ashantis.
En même temps le wax est réinterprété et investi par de nombreux créateurs africains contemporains, tels que le camerounais Serge Mouangue qui fait dialoguer la culture japonaise du kimono et le wax, Yinka Shonibare qui interroge la construction identitaire de l’individu à l’époque postcoloniale au travers du vêtement et du costume, en utilisant le batik[1] ou encore les créateurs Loza Maleombhoou et Elie Kuamé, qui ont collaboré avec l’entreprise Vlisco à l’occasion du 170e anniversaire de l’entreprise néerlandaise[2]. Le wax a donc une place à part dans la culture africaine et mondiale, qu’il convient d’interroger, dans ses relations avec l’Europe notamment.
De nombreuses expositions ont rendu compte ces dernières années des échanges vivaces, quelquefois complexes et conflictuels entre les continents à propos des textiles africains et la mode [3], et notamment à propos du wax. Il convient d’interroger les codes, les signes que véhiculent le wax pour en dégager des éléments d’une sémiologie qui tend à se redéfinir en permanence, et de questionner les contextes et glissements de sens opérés au fil des réappropriations culturelles[4]. Car ce qui est intéressant dans les cultures du wax, c’est justement l’invention d’une «tradition inventée»[5].